Aussi indispensables au saut du lit que le combo café-tartines, elles donnent le « la » des matinées bourguignonnes. Leurs infos, leurs jeux et leurs bons plans rythment nos journées. Reportage au cœur de trois stations locales à l’écoute de leurs auditeurs et prêtes à relever, entre autres défis, celui de la diffusion numérique.
En Côte d’Or, une trentaine de radios se partagent les 79 fréquences FM attribuées par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA). En Saône-et-Loire, elles sont 29, pour 88 fréquences. Le CSA distingue le service public (France Bleu Bourgogne et les radios du groupe Radio France) et les radios privées ou associatives, réparties en cinq catégories. En catégorie A se retrouvent les associatives : Diversité FM, Radio Dijon Campus, Radio Shalom Bourgogne ou Radio Espérance. Les privées locales ou régionales sont classées en B, à l’instar de Fréquence Plus ou de K6 FM. Les radios nationales ayant une antenne locale constituent la catégorie C : Virgin Radio, Nostalgie, Chérie FM… Enfin on écoute en Bourgogne des radios thématiques nationales qui n’ont pas de station locale, comme RFM (catégorie D), et les trois radios généralistes nationales de la catégorie E que sont RTL, Europe1 et RMC. Ce paysage radiophonique doit cette année s’adapter au déploiement du DAB+, norme mondialement utilisée pour la radio-diffusion numérique (Digital Audio Broadcasting +). Aujourd’hui, 25 % des Français ont accès au DAB+. D’ici à 2021, plus de 40 % de la population devrait être équipée. Les promesses ? Une qualité de son supérieure à la FM, une continuité d’écoute facilitée lors de déplacements et des contenus enrichis (les « données associées »). Dans la zone de Dijon, 26 fréquences DAB+ ont été attribuées, notamment à France Bleu Bourgogne, Fréquence Plus et Diversité FM. Alors, prêt pour la radio de demain ?
FRANCE BLEU BOURGOGNE
LA VIE EN BLEU
« Nous sommes la deuxième radio la plus écoutée en Côte-d’Or, juste derrière RTL, avec 52 300 auditeurs par jour (Médiamétrie juillet 2019). Nous avons gagné presque 10 000 nouveaux auditeurs quotidiens cette année. C’est un grand bond en avant dans un contexte où l’écoute radio baisse de manière générale. Parmi les 44 radios du réseau France Bleu, nous avons le troisième meilleur résultat, juste derrière Nantes et Nîmes », se félicite Lionel Gony, directeur de France Bleu Bourgogne. L’ancien staffeur-ornementiste, gérant de supérette, chauffeur de bus, barman puis journaliste radio – il a vécu plusieurs vies – façonne depuis son arrivée en 2013 la couleur « Bleu Bourgogne ». Avec les ingrédients qui ont fait le succès du réseau – l’info, l’hyper-proximité et le caractère –, l’antenne côte d’orienne accroche plus de 10 % de la population du département. Mais la réussite tient aussi à l’esprit d’expérimentation cher à Lionel Gony et à Philippe Moity, le responsable des programmes, qui a rejoint les studios dijonnais en 2018. Leur dada : bousculer gentiment les habitudes, avec un zeste d’humour et une sévère dose de bonne humeur. L’émission maison, « Open Bar » (ex-café des bourrus), illustre bien cette singularité. De 10h à midi, du lundi au vendredi, trois invités viennent livrer leurs commentaires mi-sérieux mi-amusés sur les actualités locales dans une ambiance bon enfant. « Les “barrés” ne sont pas des experts, ce sont des gens du quotidien. Cette émission cherche à transmettre de jolies émotions : du rire, de l’empathie, de la sympathie, de la compassion », analyse Philippe Moity. En coulisses, Sarah Starke, responsable technique de la station, assure la réalisation sonore avec ses équipes : « Open Bar, c’est l’émission idéale à emmener sur le terrain, dans un café dijonnais ou à la foire gastronomique par exemple. Ça nous donne l’occasion de réaliser de petites prouesses techniques ».
100 % DFCO !
Des émotions fortes voire passionnées, les cadres de France Bleu Bourgogne s’attendent à en susciter en installant leur nouvelle émission « 100 % DFCO » en 2020-2021. Un choix plutôt osé puisqu’en face la concurrence se nomme Canal+, L’Équipe TV, Eurosport ou BeIN Sports. Des poids lourds, donc. Oui mais France Bleu Bourgogne a plusieurs atouts dans sa manche : l’émission traitera du DFCO, rien que du DFCO, ce que nulle autre émission ne fait à l’heure actuelle (ou très ponctuellement). Un tel contenu ne devrait pas laisser indifférents les supporters du club de ligue 1. Et surtout, là où les grandes chaînes de sport doivent rester neutres, « nous sommes les seuls à pouvoir être partisans et nous en jouerons ! », anticipe le directeur d’antenne. Diffusée tous les soirs de 18h à 19h, l’émission ambitionne de fidéliser de nouveaux auditeurs : « Nous espérons, grâce à cette émission 100 % football local, aller chercher 2 000 à 3 000 auditeurs de plus. Notre pari serait alors réussi », ajoute Lionel Gony. Quand on sait que ce passionné de ballon rond a commencé sa carrière de radio en commentant des matchs de foot pour France Bleu Isère, on se dit, en quelque sorte, que la boucle est bouclée. Ce retour aux sources sera mâtiné de « café des bourrus ». Philippe Moity décrit la future émission en ces termes : « Trois invités viendront en plateau commenter l’actualité du DFCO. Ils pourront extrapoler sur les autres actualités sportives locales. Il y aura un mélange entre vrais spécialistes et amateurs, avec un état d’esprit assez proche d’Open Bar. Ce sera une émission légère et décomplexée ». Pour l’écouter, les auditeurs devront patienter jusqu’au coup d’envoi à l’automne 2020.
DIVERSITÉ FM
ONDES CITOYENNES
A entendre son débit rapide ponctué d’anecdotes, on comprend vite que Cédric Tarteret, président de l’association qui porte Diversité FM, a eu mille vies : employé au ministère de la Défense, sportif de haut niveau, diplômé en aménagement de l’espace naturel et en communication et… passionné de radio dès l’adolescence. Ce touche-à-tout crée en 2003 l’association Dans ta face promotion, axée cultures urbaines et hip hop. Quelques années plus tard, il ajoute une corde à son arc en développant une radio associative où tolérance, ouverture et diversité sont mises en avant. Diversité FM, basée à Montbard et à Dijon, diffuse depuis septembre 2017 en FM (103.9) en Bourgogne et en Champagne, mais aussi sur internet, en DAB+ et sur appli mobile. La radio « citoyenne et musicale » propose une programmation alternative et engagée sur une grande variété de thèmes : musiques actuelles, lutte contre les discriminations, égalité femme-homme, francophonie, patrimoine naturel… Reconnue par ses pairs, la station a accueilli à Dijon une rencontre nationale des radios associatives et un conseil d’administration de la confédération nationale des radios associatives (CNRA) les 22 et 23 novembre
derniers. Cette année, Cédric Tarteret a dans ses cartons des projets ambitieux, par exemple « Active-toi pour ta planète » avec des lycéens. « Nous comptons créer un centre de formation des métiers de la radio et de l’audiovisuel, une première dans la région. Nous travaillons aussi sur un projet de chaîne de télévision, dans l’esprit de Diversité FM. »
Le DAB+, Cédric Tarteret le voit comme une chance : « Nous avons été sélectionnés pour avoir une fréquence à Dijon, cela confirme que nous faisons du bon boulot. Cependant je déplore le fait que trop peu de radios associatives accèdent aux fréquences DAB+, alors que c’était une volonté affichée du CSA ». Diversité FM espère obtenir d’autres fréquences notamment sur l’axe Troyes-Auxerre-Chalon-sur-Saône. « L’objectif, c’est de faire grandir notre radio pour qu’elle devienne à terme une radio pour tous dans le Centre-Est. » Pour la jeune station, la valeur n’attendra pas le nombre des années.
FRÉQUENCE PLUS
RADIO POSITIVE
Installée à Dole, Fréquence Plus émet à Dijon depuis 2002. En Bourgogne-Franche-Comté, près de 210 000 auditeurs écoutent chaque semaine sa programmation axée « infos, musiques et jeux ». Anthony Eustache, son président, voit arriver la radio numérique terrestre comme une opportunité : « Nous avons obtenu des autorisations DAB+ à Strasbourg et dans les zones géographiques “Dijon étendue” et “Besançon étendue”. À terme, nous voulons devenir la radio régionale majeure dans le Grand Est, tout en continuant d’offrir des contenus ville par ville ». L’alliance entre des contenus ultralocaux, une large couverture régionale et une présence multicanale (FM, DAB+, appli mobile) explique la longévité de cette radio qui, depuis 33 ans, est d’abord une aventure familiale : alors que la loi de 1981 met fin au monopole d’État sur la radiodiffusion, Maurice Eustache (son père) s’engouffre dans la brèche et crée Fréquence Plus en 1986. Son fils fait ses classes dans une radio associative dès l’âge de 14 ans, il rejoint cinq ans plus tard la station paternelle, qu’il rachète en 2008. « Ma plus belle fierté a été d’inaugurer nos nouveaux studios de 500 mètres carrés en juin 2015. Mon père, qui nous a quittés quelques mois plus tard, était très ému », se souvient le président. Dans ses locaux modernisés, la station
doloise s’est offert un studio dédié aux émissions en public, qui a reçu Anggun, Trois Cafés gourmands, Bilal Hassani ou Kev Adams. Rien que ça. Les ingrédients du succès sont là : une équipe solide (17 salariés permanents), une grande capacité d’adaptation et un ton toujours positif. « Les gens qui nous écoutent veulent passer un bon moment, souffler, s’aérer. » Fréquence Plus s’est donné une mission : diffuser de bonnes ondes.